Histoire oubliée du football algérien : les premiers clubs depuis 1897

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Le football en Algérie possède une riche et captivante histoire qui débute à la fin du XIXe siècle, bien avant l’accession à l’indépendance en 1962. Bien que de nombreux fans considèrent des clubs tels que le Mouloudia Club d’Alger (MCA) comme les précurseurs du football national, il est essentiel de souligner que plusieurs autres clubs avaient déjà vu le jour durant la période coloniale, certains dès les années 1890. Cet article se propose d’explorer en profondeur l’historique des clubs les plus anciens d’Algérie, qu’ils soient encore en activité ou aient disparu au fil des ans.

Dès la fin du XIXe siècle, le football fait son entrée en Afrique du Nord, grâce à l’initiative de colons européens, de militaires et de commerçants français, espagnols et italiens. En Algérie, alors sous domination française, de nombreux clubs sportifs sont créés, mais ceux-ci sont presque exclusivement réservés aux colons européens, laissant les Algériens musulmans en marge du sport officiel. Malgré cette exclusion, les communautés locales s’organisent rapidement dans les années 1920 pour établir leurs propres clubs, qui deviendront des symboles de résistance culturelle et d’affirmation de l’identité nationale.

1. Gallia Sports d’Alger (GSA) – Fondé en 1897 (disparu)

  • Date de création : 1897
  • Lieu : Alger
  • Fondateurs : Colons européens
  • Statut actuel : Disparu

Fondé en 1897, le Gallia Sports d’Alger est reconnu comme le premier club de football en Algérie. Situé au cœur d’Alger, ce club colonial a exercé une influence majeure sur le football national pendant de nombreuses années. Composé uniquement de colons européens, le Gallia a dominé les compétitions locales et régionales, notamment la Ligue d’Alger. En tant que pionnier, il a joué un rôle clé dans l’essor du football en Afrique du Nord. Cependant, comme d’autres clubs européens, il a disparu après l’indépendance en 1962, emportant avec lui une partie méconnue de l’histoire sportive algérienne.

Toutefois, il ne survécut pas aux changements politiques et à la restructuration du football algérien après l’indépendance.

2. Club Sportif Constantinois (CS Constantine) – Fondé en 1898 (actif)

  • Date de création : 1898
  • Lieu : Constantine
  • Nom d’origine : Iqbal Emancipation (version controversée)
  • Nom actuel : CS Constantine (depuis 1926 officiellement)
  • Statut actuel : Actif

Le CS Constantine, surnommé le Doyen ou Sanafirs, est le plus ancien club de football encore en activité en Algérie. Bien que la date de création de 1898 ait parfois été contestée, le club célèbre officiellement cette année comme étant celle de sa fondation.

C’est le premier club musulman actif dans l’Est algérien, et il est devenu une véritable institution à Constantine. Aujourd’hui encore, il évolue en première division (Ligue 1 Mobilis) et attire des milliers de supporters dans le stade Chahid Hamlaoui.

3. Sporting Club de Bel-Abbès / SCBA – Fondé en 1906 (disparu)

  • Date de création : 1906
  • Lieu : Sidi Bel Abbès
  • Statut actuel : Disparu / fusionné

Le Sporting Club de Bel-Abbès fut l’un des premiers clubs de l’Ouest algérien. Il servira plus tard de base à l’USM Bel Abbès, fondée par des musulmans algériens. Ce club représentait une classe coloniale privilégiée, mais il permit indirectement le développement du football dans la région.

4. Racing Universitaire d’Alger (RUA) – Fondé en 1906 (disparu)

  • Date de création : 1906
  • Lieu : Alger
  • Statut actuel : Disparu

Le RUA était une équipe très prestigieuse durant l’époque coloniale. Elle rassemblait des étudiants européens et faisait partie des meilleurs clubs d’Afrique du Nord pendant les années 1920 et 1930. Le club a disparu dans les années suivant l’indépendance, avec la réorganisation du sport algérien.

5. Olympique Hussein Dey – 1910 (disparu / absorbé)

Fondé en 1910, l’Olympique de Hussein Dey est l’un des premiers clubs algériens de la périphérie d’Alger, à une époque où le football était largement dominé par des équipes européennes. Situé dans le quartier populaire de Hussein Dey, le club comptait principalement des joueurs européens, mais il a joué un rôle essentiel dans la promotion du football au sein des communautés algériennes. Il évoluait dans les divisions régionales de la Ligue d’Alger. Bien qu’il n’ait pas laissé une empreinte marquante en termes de titres, l’Olympique de Hussein Dey reste un symbole de l’émergence du football algérien dès les débuts du XXe siècle. Ce club, également fondé par des colons, a existé jusqu’au début des années 60. Il sera absorbé ou éclipsé dans l’histoire par des clubs plus populaires, comme le NA Hussein Dey (fondé en 1947), qui représente les quartiers populaires musulmans.

6. Association Sportive de Saint-Eugène

L’Association Sportive de Saint-Eugène, fondée en 1911 dans le quartier européen de Saint-Eugène à Alger, aujourd’hui connu sous le nom de Bologhine, a été l’un des clubs les plus renommés du football colonial algérien. Majoritairement composé de joueurs européens, le club s’est distingué par ses nombreux titres régionaux et ses participations à la Coupe d’Afrique du Nord, se posant en tant que rival direct du Gallia Sports d’Alger. Après l’indépendance en 1962, l’AS Saint-Eugène a disparu, laissant derrière elle un héritage sportif riche, mais aussi un reflet des divisions communautaires qui caractérisaient le football de l’époque coloniale.

7. Club Athlétique Oranais (CAO) – 1917 (disparu / absorbé)

Fondé en 1917, le Club Athlétique Oranais (CAO) est l’un des premiers clubs de football établis à Oran durant la période coloniale. Représentant la communauté européenne en Algérie, le CAO incarnait l’élite sportive de l’époque, à l’instar du Gallia Sports à Alger ou de l’AS Saint-Eugène. Situé dans la ville cosmopolite d’Oran, le club évoluait dans la Division Honneur d’Oranie, une ligue régionale très disputée. Il affrontait régulièrement les grandes équipes coloniales, contribuant ainsi à forger les premières rivalités footballistiques de l’Ouest algérien. Bien qu’il ait connu un certain prestige dans les années 1920 et 1930, le CAO n’a jamais atteint le même niveau de reconnaissance nationale que d’autres clubs contemporains. Avec l’indépendance de l’Algérie en 1962 et le départ massif de la population coloniale, le club a disparu, sans qu’aucun projet de reprise ne soit envisagé par la suite. Aujourd’hui, le Club Athlétique Oranais est largement oublié, mais il demeure une composante essentielle de l’histoire du football algérien, témoignant d’une époque marquée par des divisions ethniques dans le sport, avant l’émergence des clubs nationalistes algériens.

8. Union Sportive Musulmane Blidéenne (USMB) – Fondée en 1932 (actif)

  • Date de création : 1932
  • Lieu : Blida
  • Statut actuel : Actif

L’USM Blida est l’un des premiers clubs fondés par des musulmans en dehors d’Alger. C’est un des clubs les plus anciens du Centre algérien toujours actif. Elle dispose d’une histoire riche, mêlant sport et patriotisme.

Les clubs musulmans historiques (période de réveil national)

À partir des années 1920, les Algériens musulmans commencent à fonder leurs propres clubs de football en réponse à l’exclusion coloniale. Ces clubs ne sont pas seulement sportifs : ils deviennent des lieux de militantisme, de solidarité, et de fierté nationale.

Voici les principaux clubs musulmans emblématiques :

Mouloudia Club d’Alger (MCA) – 1921

Ce club prestigieux a été fondé par des Algériens de confession musulmane. Ses couleurs, le vert et le rouge, représentent des symboles à la fois religieux et nationaux. Après l’indépendance, il s’est imposé comme un acteur majeur du football algérien.

USM Alger – 1937

Créé par de jeunes nationalistes originaires du quartier de la Casbah, ce club incarne la résistance populaire et se distingue comme l’un des clubs les plus emblématiques et titrés d’Algérie.

MC Oran – 1946

Le Club musulman d’Oran, établi dans un contexte colonial marqué, a joué un rôle significatif dans la démocratisation du sport dans la région ouest du pays.

Clubs coloniaux disparus après 1962

La majorité des clubs fondés par les Européens (Gallia Sports, RUA, Olympique Hussein Dey, etc.) ont disparu après l’indépendance. Le football algérien a été complètement restructuré pour refléter la nouvelle identité nationale. Certains clubs ont été nationalisés, fusionnés ou remplacés par de nouvelles entités populaires.

L’impact historique de ces clubs

Ces clubs ont contribué à la promotion du football à travers toutes les régions d’Algérie, favorisant ainsi l’épanouissement de ce sport au niveau national. Ils ont également joué un rôle essentiel dans l’établissement d’un sentiment d’unité et de fierté nationale, utilisant le sport comme vecteur d’identité collective. De plus, ces institutions ont servi de centres de mobilisation politique et sociale, tant avant qu’après l’indépendance, renforçant l’engagement civique et la cohésion sociale.

Héritage et modernité

Aujourd’hui, des clubs tels que le CS Constantine, le MCA, l’USMA et le MCO continuent de façonner l’histoire du football algérien, mais leur influence dépasse largement le cadre sportif. Ils unissent des millions de supporters, incarnent des valeurs de résistance, d’identité et de mémoire collective, et contribuent au développement des jeunes ainsi qu’à la vie communautaire.

Chronologie simplifiée des clubs les plus anciens

Conclusion

Le football en Algérie transcende la simple passion pour devenir une véritable mémoire collective. Il s’est développé à travers des clubs créés dans des contextes variés, allant du colonialisme à des mouvements militants, chacun contribuant à enrichir ce patrimoine unique. Des institutions comme le Gallia Sports, fondé en 1897, au CS Constantine, toujours en activité, sans oublier les clubs emblématiques établis par des Algériens musulmans entre les années 1920 et 1940, l’histoire du football algérien est profondément liée à son contexte politique, social et culturel.